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L’OTAN, Que Sais-Je ?

L'OTAN - Que sais-je ?
LE 27.05.2022

Couverture de l’ouvrage: Amélie Zima, L’OTAN, Paris, PUF, Que-Sais-Je, 2021.

Compte-rendu de l’ouvrage écrit par Amélie Zima

Amélie Zima

Amélie Zima est docteure en science politique de l’Université Paris-Nanterre, chercheuse postdoctorale à l’Université Paris II Panthéon Assas (Centre Thucydide) et à l’IRSEM (Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire).

Amélie Zima, L’OTAN, Paris, PUF, Que-Sais-Je, 2021.

Les récentes évolutions de l’OTAN attesteraient de sa crise interne et de la perte de sa raison d’être. Les déclarations du président Trump sur son obsolescence, du président Macron sur sa mort cérébrale, les tensions suscitées par les actions de la Turquie ou les dérives autoritaires de certains de ces membres témoigneraient même de son inutilité.

A rebours de ce constat, cet ouvrage analyse les raisons qui expliquent l’exceptionnelle longévité de cette organisation qui a fêté en décembre 2019 ses soixante-dix ans. En effet depuis sa création en 1949, l’Alliance a fait preuve d’une grande plasticité dans son fonctionnement, ses structures et modes de décision qui lui ont permis de surmonter tant les nombreuses divisions de la guerre froide comme la crise de Suez et le retrait de la France du commandement intégré que la dissolution de l’URSS et l’adaptation au nouvel environnement de sécurité. 

Pour ce faire, ce livre opte pour une perspective à la fois historique et thématique. Dans un premier temps, il présente la création de l’Alliance et son institutionnalisation conjoncturelle au début des années cinquante, due entre autres à la guerre de Corée. A contrario de l’idée commune selon laquelle la période de la guerre froide aurait été dénuée de tensions en raison de l’unité face à la menace soviétique, l’ouvrage montre les nombreuses tensions qui surgissent entre alliés comme la question du partage des tâches, de la dissuasion nucléaire ou de l’entrée de la RFA dans l’OTAN. Cette partie historique permet également de revenir sur l’affichage normatif de l’Alliance en montrant que dès sa fondation, les valeurs libérales et démocratiques sont mises au second plan puisque le Portugal dirigé par Salazar fut membre fondateur de l’OTAN et que plusieurs pays membres connurent des dérives autoritaires comme la Grèce des colonels ou la Turquie. 

L’ouvrage présente ensuite les structures civiles et militaires de l’Alliance ainsi que le mode de prise de décision. L’OTAN est une organisation qui opère sur la base du consensus. Différent de l’unanimité, ce mode de décision permet de ne pas médiatiser les conflits entre Etats membres mais présente l’inconvénient de ne pas être transparent. Cette partie montre aussi l’importance des groupes informels dans la fabrique de la décision ainsi que la persistance d’un clivage est-ouest, notamment dans la répartition des postes au sein de l’Alliance. Enfin, cette partie expose les différents concepts stratégiques qui guident les modalités d’action et les objectifs de l’Alliance. L’étude de ces concepts démontre une extension continue des missions de l’OTAN depuis la fin de la guerre froide, de la défense territoriale à la gestion de crises et à la déterritorialisation des menaces avec l’attention désormais portée aux cyber-attaques et à la lutte contre le réchauffement climatique. L’extension des domaines d’action montre également comment l’appropriation d’une définition plus large de la sécurité a conduit l’OTAN à combiner des instruments politiques et militaires pour développer de nouvelles compétences. 

Le troisième chapitre est consacré à la mise en place de partenariats par l’OTAN à la fin de la guerre froide, principalement en direction de l’Europe orientale et de l’Asie centrale. En analysant la relation heurtée entre l’OTAN et Moscou, ainsi que les cas géorgien et ukrainien, dont des régions sont occupées illégalement par la Russie, cette partie démontre l’inefficacité partielle de ce réseau de partenariats qui n’a pas permis de construire une espace euro-atlantique de coopération et de sécurité. L’Alliance n’agit pas complètement comme un facteur protecteur, modérateur et stabilisateur en Europe. 

La quatrième partie analyse les politiques d’élargissement de l’OTAN. Elle présente comment, après la chute du mur de Berlin, l’Alliance s’est ouverte aux anciens pays du bloc de l’Est et a élaboré un nouveau processus d’adhésion afin de garantir l’adhésion de membres respectant les valeurs libérales et démocratiques et étant efficients militairement. Cette politique d’élargissement a permis à l’Alliance de doubler le nombre de ses membres en passant de seize en 1989 à trente nations en 2020 et d’inclure des pays d’Europe centrale et orientale ainsi que des Balkans. 

Enfin, le dernier chapitre est consacré à l’institutionnalisation de la relation avec l’Union européenne. Nouée au cours des années quatre-vingt-dix, ce partenariat reste peu opérant et son approfondissement bute principalement sur la question du développement d’une défense européenne sur laquelle les Alliés ont des positionnements divergents. 

Ainsi, en étudiant l’ensemble de ces politiques sous l’angle de stratégies de légitimation, ce livre montre comment l’extension du champ d’action de l’OTAN, ses élargissements après 1989 ainsi que la mise en place de politiques de partenariat et de coopération participent d’un ensemble visant à assurer la pérennité de l’organisation. Cependant l’évolution de l’Alliance et ses relations avec des pays tiers dépendent également de ses dynamiques internes. Si l’OTAN prétend être un modèle normatif fondé sur l’État de droit, la démocratie et la liberté, l’organisation et ses membres ne peuvent s’astreindre d’une réflexion sur leurs discours, leurs pratiques et leurs conséquences. 

Pour citer ce document :
Amélie Zima, "L’OTAN, Que Sais-Je ?. Compte-rendu de l’ouvrage écrit par Amélie Zima ". Journal du multilatéralisme, ISSN 2825-6107 [en ligne], 27.05.2022, https://observatoire-multilateralisme.fr/publications/lotan-que-sais-je/