
Une patrouille des Nations unies dans la zone démilitarisée, sur l’île de Chypre. Dickelbers / Wikimedia Commons, CC BY-SA 3.0
Comment l’espace professionnel onusien marginalise-t-il le personnel local à Chypre ?
Hugo Longiéras est doctorant en relations internationales au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po.
Les employés locaux travaillant pour des interventions de l’ONU sont souvent invisibles et leur rôle incompris. Paradoxalement, alors qu’ils travaillent pour une organisation internationale, ils sont systématiquement renvoyés à leur appartenance nationale ou locale. Cet article tente d’établir la source de de la marginalisation des employés locaux de cette sphère professionnelle et leur exclusion de l’espace international. À partir d’entretiens réalisés auprès d’employés de l’UNFICYP et du PNUD à Chypre, nous expliquons comment la hiérarchisation de ces espaces favorise leur exclusion. Il en ressort qu’à travers l’assignation de caractéristiques supposément liées à la localité et à l’internationalité, les professionnels sont différenciés et hiérarchisés. Ces différences se basent notamment sur la nature des compétences et la capacité à être impartial du personnel. Cependant, derrière la tentative de légitimer la division hiérarchique du travail par la rationalité, se cache en réalité la constitution d’un ordre social et politique au sein de l’organisation excluant les professionnels locaux. En accordant une attention inhabituelle aux les professionnels locaux de l’ONU, cet article participe aux réflexions sur la hiérarchisation de l’espace international.
À travers ses missions et programmes sur le terrain, l’ONU emploie des milliers de travailleurs civils. Si l’image de l’expatrié voyageant d’une zone de conflit à l’autre n’est pas entièrement fausse, elle doit être nuancée. En réalité, la majorité des employés civils de l’ONU sont recrutés localement[1]Malgré de fortes disparités, Steffen Eckhard établit qu’en moyenne 58% du staff civil des missions de maintien de la paix est recruté nationalement (Eckhard 2019). Par exemple, en 2023-2024 … Continue reading.
Au-delà de représenter une main d’œuvre bien moins onéreuse que le personnel international, les employés locaux de ces interventions remplissent également des fonctions essentielles à leur bon fonctionnement. Alors, qu’elles ont besoin de s’intégrer dans un environnement local spécifique pour produire des effets positifs, les internationaux passent de pays en pays et sont généralement peu familiers avec l’histoire, les cultures et la politique locale (Autesserre 2014). Dans un tel contexte, ces employés servent d’intermédiaires afin d’établir des liens entre les acteurs locaux et l’organisation (Eckhard 2021). Cette fonction est particulièrement bien illustrée par les interprètes et traducteurs qui permettent le travail quotidien des employés de l’ONU en brisant un temps la frontière linguistique (Baker 2019).
Cependant, souvent considérés comme de simples exécutants, les employés locaux sont généralement invisibles tant dans la communication de l’ONU que dans les travaux des chercheurs. Nous avançons que cette exclusion ne peut être comprise que par la hiérarchisation de l’espace professionnel. La recherche fait déjà état de l’existence de rapports de pouvoir marquant les relations entre les contingents du Nord et du Sud global (Henry 2015; Ruffa et Rietjens 2023) ou celles entre les Casques bleus et les populations locales (Pingeot 2023; Razack 2004). Ces travaux, ainsi que ceux de sociologues (Lecler, Morival, et Bouagga 2018), permettent aussi de penser les interventions internationales comme des espaces empreints de hiérarchies. En revanche, ces études ne sont pas suffisantes pour rendre compte de la marginalisation des employés locaux dans ces espaces.
Dès lors, l’objet de cet article est de questionner une sphère marquée par des inégalités et des rapports d’autorité. Nous expliquerons comment cet espace est hiérarchisé par le travail, et notamment à travers les dynamiques de catégorisation professionnelle des employés de l’ONU en fonction de leur internationalité ou de leur localité.
Cet article repose sur un mémoire réalisé à Sciences Po Paris et soutenu en mai 2024. Il s’appuie sur 24 entretiens semi-directifs avec des employés locaux et internationaux, de grades divers, réalisés lors d’un terrain effectué à Nicosie (Chypre) auprès d’employés de la Force des Nations Unies Chargée du Maintien de la Paix à Chypre (UNFICYP) et de deux projets du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD).
Subordonnés et précarisés : les employés locaux aux marges de l’espace professionnel
La relation d’autorité entre locaux et internationaux
Le système onusien de recrutement se concentre autour de quatre principales catégories de postes. Parmi celles-ci, les administrateurs internationaux (P+) et les agents du Service mobile (FS) sont recrutés à l’international et ne peuvent pas posséder la nationalité du pays hôte. Alors que ceux-ci occupent des postes de direction et des fonctions exécutives au sein de l’organisation, les agents du Service mobile se retrouvent à des postes de soutien. À l’inverse, certains administrateurs sont recrutés sur le plan national et appartiennent dès lors à la catégorie NPO (National Professional Officers). Ceux-ci se retrouvent généralement à des postes d’officiers d’affaires civiles. Enfin, la quasi-totalité du personnel des Services Généraux (GS) est recruté localement. La majorité d’entre eux occupe des fonctions de soutien comme la traduction, l’informatique, la sécurité, l’administration, et l’entretien. Il est également utile de rappeler qu’une grande partie de la main d’œuvre de l’ONU est formée d’individus recrutés localement grâce à des contrats courts à durée déterminée.
En parallèle, certaines pratiques participent à établir des hiérarchies entre ces catégories au sein de l’organisation. Ainsi, sur le papier, les P+ et NPO évoluent à de grades équivalents, tous deux supérieurs aux GS et FS. Cependant, une norme informelle du système onusien empêche des employés locaux d’occuper des postes de supervision d’employés internationaux (Coleman 2020). Les employés locaux, en tant que catégories d’emplois distinctes (GS, mais aussi NPO) se retrouvent ainsi systématiquement subordonnés à leurs collègues internationaux, malgré l’équivalence formelle de leur grade dans certains cas.
Ainsi, les hiérarchies façonnent un environnement de travail structuré par des relations d’autorité. La relation entre le personnel international et local prend ainsi souvent une forme semblable à celle entre un patron et son salarié. Une employée Chypriote-Grecque de l’UNFICYP explique :
« Les internationaux étaient toujours les superviseurs, les patrons. C’est eux qui décidaient si une personne allait obtenir une promotion, si cette personne allait être virée du bureau. C’est ce genre de décisions qu’ils prennent également. »[2]Entretien réalisé par l’auteur avec une ancienne secrétaire du PNUD (Nicosie, Chypre, Février 2024).
Un système d’inégalités
Travailler pour l’ONU en tant qu’employé local, c’est aussi faire face à des inégalités qui accentuent sa précarisation et sa marginalisation au sein de l’organisation. Ces inégalités sont d’abord matérielles. Alors que le salaire des fonctionnaires P+ est calculé sur la base du coût de la vie à New York, celui des NPO et des GS est aligné sur l’économie locale. Les effets combinés de primes liées au danger et à la difficulté de vie de certains lieux d’affectation accroissent encore davantage ces inégalités matérielles, même à niveau hiérarchique équivalent[3]À Chypre, les employés internationaux ne touchent pas de prime de risque. En revanche, à échelon équivalent, un employé international touche tout de même plus d’indemnités qu’un employé … Continue reading.
La précarité de l’emploi est aussi une réalité (Baker 2014). D’abord, le plafond de verre existant un sein de l’ONU limite leur évolution professionnelle, les forçant à se satisfaire de postes subalternes ou à quitter l’organisation. Ensuite, les missions et les programmes de l’ONU sont amenés à fermer régulièrement, laissant derrière eux leurs employés locaux. Alors que les internationaux retrouvent aisément des postes dans d’autres missions, rares sont les locaux réussissant à s’expatrier. Enfin, une large partie du personnel local est employé grâce à des contrats courts renouvelables tous les 6 mois. Une ancienne employée Chypriote-Grecque du PNUD à Nicosie décrit sa situation :
« J’ai toujours eu un contrat de service d’une durée de trois à six mois. Tous les trois ou six mois, il était toujours renouvelé. Cela a duré près de 12 ans et je n’ai jamais été titularisée. J’étais toujours sous contrat de service et un jour, ils m’ont dit qu’ils ne le renouvelaient pas. Je n’ai donc bénéficié d’aucun avantage financier après mon départ. […] Je devais signer un contrat tous les trois mois… c’était ridicule. »[4] Entretien réalisé par l’auteur avec une ancienne secrétaire du PNUD (Nicosie, Chypre, Février 2024).
La combinaison de ce système d’inégalité et de précarité, et de ce rapport d’autorité entre le personnel international et local renforce mutuellement la relation de pouvoir. Le manque de sécurité au travail du personnel local augmente la dépendance et donc le pouvoir de leurs supérieurs internationaux. Afin de prétendre à une évolution de leur carrière, ou simplement de voir leur contrat renouvelé, les locaux doivent convaincre leurs supérieurs internationaux.
Au-delà des disparités économiques évidentes, les employés locaux sont également soumis à une précarité sécuritaire accrue par rapport à leurs collègues internationaux. Celle-ci peut découler directement de la division du travail mentionnée au-dessus. En effet, le personnel local étant davantage dans des positions de contact, ils sont aussi plus régulièrement l’objet de menaces, d’intimidations, voire de violences. Cela est souvent accentué par la position particulière des employés locaux : ils sont à la fois des intervenants travaillant pour l’ONU, mais aussi des Chypriotes vivant directement dans les communautés visées par l’intervention. Ainsi, plusieurs employés Chypriotes-Grecs et Chypriotes-Turcs témoignent d’avoir été l’objets d’injures racistes, du sentiment diffus d’avoir une cible sur le dos, ou de menaces de mort explicites.
Catégoriser les professionnels pour les hiérarchiser
Produire et naturaliser les différences : la construction de la localité et l’internationalité
Afin de comprendre comment s’imposent ces hiérarchies, il est nécessaire de remettre en question les notions mêmes de personnel « local » et « international ». Il s’agit surtout de rendre compte des dynamiques qui permettent la différenciation entre les deux catégories (Mathieu 2019), et donc de comprendre pourquoi certains employés sont associés à l’internationalité et d’autres à la localité. Ainsi, au lieu d’appréhender les compétences et l’impartialité comme des traits définitifs de l’internationalité et de la localité, nous proposons ici de les appréhender comme des caractéristiques socialement construites, comme des labels porteurs de sens pour les individus concernés.
Deux principaux traits sont associés aux employés locaux. D’abord, ils sont perçus comme moins compétents que leurs homologues internationaux. Alors que les locaux sont associés à des compétences liées au local (connaissance de l’histoire, des dynamiques politiques, des langues vernaculaires), celles des internationaux sont plus « thématiques » (management, construction de projets) car découlant d’une éducation prestigieuse et de l’expérience de la mobilité entre les lieux d’affectation (Autesserre 2014). Les compétences sont parfois aussi perçues comme découlant de caractéristiques ethniques, culturelles, et raciales. Par exemple, plusieurs participants – internationaux et locaux – évoquent le « caractère méditerranéen » des employés Chypriotes qui contreviendrait aux exigences d’éthique au travail. Trop impulsifs et familiers, les Chypriotes seraient incapables de tenir des échéances et de travailler efficacement.
Le personnel local est aussi perçu comme incapable d’impartialité. Alors que les internationaux se détachent de leur nationalité, jusqu’à éliminer toute référence à celle-ci dans leur environnement de travail (Von Billerbeck 2020), les locaux (aussi appelés « nationaux ») sont eux constamment rappelés à leur appartenance nationale. Le personnel local est là-aussi réifié autour de traits supposément ethniques ou culturels (corruptibilité, liens étroits avec leur communauté) qui renforce ce manque de confiance. Ainsi, le supposé attachement communautaire des Chypriotes les empêcherait de devenir de véritables fonctionnaires internationaux indépendants dans l’exercice de leur travail. Une ancienne haut-gradée de l’UNIFCYP illustre cela :
« Vous n’êtes pas impartial lorsque vous êtes local. Vous faites partie du conflit. Les gens ont de la famille et des amis impliqués, ils ne peuvent donc pas l’être… Je pense que c’est la raison pour laquelle il faut du personnel international. Et bien sûr, il y aura toujours des sujets délicats que vous ne voudrez pas voir être divulgués. »[5]Entretien réalisé par l’auteur avec une ancienne haut-gradée de l’UNFICYP (Nicosie, Chypre, Février 2024).
Stratifier la localité et l’internationalité : la production d’un ordre social
Pour certains, l’incapacité des employés locaux à être compétents et impartiaux impacte directement l’efficacité de l’opération, voire sa légitimité à le faire.
Tel que démontré par Séverine Autesserre, il existe dans le champ des professionnels de la paix une hiérarchie des compétences. Les connaissances dîtes « thématiques » sont particulièrement valorisées alors que les connaisseurs du local ne sont que marginalement sollicités (Autesserre 2014). Selon cet argument, les hiérarchies résulteraient de la recherche rationnelle de maximisation des compétences des employés dans une recherche d’efficacité.
En parallèle, l’assignation de la capacité, ou de l’incapacité, à être impartial est aussi à l’origine de la hiérarchisation des acteurs. Afin d’opérer sur le terrain, l’ONU a besoin du consentement de l’État hôte, et doit donc travailler à maintenir sa légitimité (United Nations 2008). Or, les locaux mettraient en danger cet attribut essentiel de l’organisation. La hiérarchie a ici un objectif stratégique : limiter la capacité d’influence (réelle et perçue) des employés locaux. Ainsi, pour l’ONU il est favorable que les interlocuteurs des acteurs locaux soient des employés internationaux et donc perçus comme impartiaux, plutôt que des employés locaux. La division hiérarchique du travail ne peut donc pas être simplement comprise comme un simple mécanisme de maximisation. Elle est aussi un mécanisme de contrôle social par lequel l’organisation favorise ou limite la capacité d’agir de ses employés, ainsi que l’image qu’elle renvoi.
Conclusion
Si nous savions que les hiérarchies structurent profondément le champ des professionnels de la paix, celles qui régissent les rapports entre employés locaux et internationaux étaient largement ignorées. Entre relations d’autorité et système d’inégalités, nous avons démontré dans cet article que la division du travail au sein de l’ONU n’a rien d’absolument rationnel mais résulte d’un processus social de différentiation, qui créé ces mêmes catégories de « locaux » et « d’internationaux », et de hiérarchisation qui les ordonne. La division hiérarchique du travail découle ainsi davantage d’une assignation identitaire que de différences naturelles entre les acteurs. Au-delà de la maximisation des compétences de chacun, la hiérarchisation est également un outil de contrôle social. Conserver les locaux en bas de l’échelle permet à l’organisation de contrôler l’action d’éléments potentiellement perçus comme dangereux et donc de maintenir un ordre politique : l’international décide, le local applique.
Notes
↑1 | Malgré de fortes disparités, Steffen Eckhard établit qu’en moyenne 58% du staff civil des missions de maintien de la paix est recruté nationalement (Eckhard 2019). Par exemple, en 2023-2024 l’UNIFCYP emploie 121 individus comme personnel local (115 GS et 7 NS) pour seulement 39 internationaux. |
---|---|
↑2 | Entretien réalisé par l’auteur avec une ancienne secrétaire du PNUD (Nicosie, Chypre, Février 2024). |
↑3 | À Chypre, les employés internationaux ne touchent pas de prime de risque. En revanche, à échelon équivalent, un employé international touche tout de même plus d’indemnités qu’un employé local. |
↑4 | Entretien réalisé par l’auteur avec une ancienne secrétaire du PNUD (Nicosie, Chypre, Février 2024). |
↑5 | Entretien réalisé par l’auteur avec une ancienne haut-gradée de l’UNFICYP (Nicosie, Chypre, Février 2024). |
Autesserre, Séverine. 2014. Peaceland: Conflict Resolution and the Everyday Politics of International Intervention. 1re éd. Cambridge University Press.
Baker, Catherine. 2014. « The Local Workforce of International Intervention in the Yugoslav Successor States: ‘Precariat’ or ‘Projectariat’? Towards an Agenda for Future Research ». International Peacekeeping 21 (1): 91‑106.
Baker, Catherine. 2019. « Language Intermediaries and Local Agency: Peacebuilding, Translation/Interpreting and Political Disempowerment in ‘Mature’ Post-Dayton Bosnia–Herzegovina ». Journal of War & Culture Studies 12 (3): 236‑50.
Coleman, Katharina. 2020. « Downsizing in UN Peacekeeping: The Impact on Civilian Peacekeepers and the Missions Employing Them ». International Peacekeeping 27 (5): 703‑31.
Eckhard, Steffen. 2019. « Comparing How Peace Operations Enable or Restrict the Influence of National Staff: Contestation from Within? » Cooperation and Conflict 54 (4): 488‑505.
Eckhard, Steffen. 2021. « Bridging the Citizen Gap: Bureaucratic Representation and Knowledge Linkage in (International) Public Administration ». Governance 34 (2): 295‑314.
Henry, Marsha. 2015. « Parades, Parties and Pests: Contradictions of Everyday Life in Peacekeeping Economies ». Journal of Intervention and Statebuilding 9 (3): 372‑90.
Lecler, Romain, Yohann Morival, et Yasmine Bouagga. 2018. « Pour une ethnographie des professionnels de l’international: » Critique internationale N° 81 (4): 9‑20.
Mathieu, Xavier. 2019. « Critical Peacebuilding and the Dilemma of Difference: The Stigma of the ‘Local’ and the Quest for Equality ». Third World Quarterly 40 (1): 36‑52.
Pingeot, Lou. 2023. Police Peacekeeping: The UN, Haiti, and the Production of Global Social Order. Oxford: Oxford University Press.
Razack, Sherene. 2004. Dark Threats and White Knights: The Somalia Affair, Peacekeeping, and the New Imperialism. Toronto: University of Toronto Press.
Ruffa, Chiara, et Sebastiaan Rietjens. 2023. « Meaning Making in Peacekeeping Missions: Mandate Interpretation and Multinational Collaboration in the UN Mission in Mali ». European Journal of International Relations 29 (1): 53‑78.
United Nations. 2008. « United Nations Peacekeeping Operations Principles and Guidelines ».
Von Billerbeck, Sarah. 2020. « “Mirror, Mirror On the Wall:” Self-Legitimation by International Organizations ». International Studies Quarterly 64 (1): 207‑19.
Hugo Longiéras, "La hiérarchisation des professionnels de la paix. Comment l’espace professionnel onusien marginalise-t-il le personnel local à Chypre ?". Journal du multilatéralisme, ISSN 2825-6107 [en ligne], 22.02.2025, https://observatoire-multilateralisme.fr/publications/la-hierarchisation-des-professionnels-de-la-paix/