Dag Hammerskjold en 1961. Photographe inconnu – Anefo, Archives nationales néerlandaises / Wikimedia Commons, CC0 1.0.
Monsieur H, diplomate pour la paix
Marie Colas est étudiante au sein du master Paix, action humanitaire et développement de Sciences Po Lille, spécialisé dans l’étude de la gestion de conflits et des questions de développement.
« […] Connaître des revers sur le chemin d’un idéal ne signifie pas être dans la mauvaise direction… », Dag Hammarskjöld.
Dag Hammarskjöld est un diplomate suédois. Il est connu pour avoir été un acteur important dans le processus de paix du conflit congolais, et pour avoir été Secrétaire général des Nations Unies de 1953 à 1961.
L’influence de son environnement familial
Il est né à Jönköping en Suède le 29 juillet 1905. Il grandit dans une famille œuvrant pour le service public suédois depuis plusieurs générations. Son père, Hjalmar Hammarskjöld, est membre du Tribunal International de La Haye, gouverneur du comté d’Uppsala, plusieurs fois ministre et Premier Ministre de la Suède de 1914 à 1917. Deux de ses frères suivent également la voie familiale, l’un ayant été gouverneur de province, l’autre membre du secrétariat de la Société des Nations puis juge au Tribunal de La Haye. Dans une interview en 1953, Dag Hammarskjöld évoque la grande influence de sa famille sur sa vocation: « j’ai hérité de la conviction qu’aucune vie n’était plus satisfaisante qu’une vie de service désintéressé pour son pays – ou l’humanité ».
Il sort diplômé de l’Université d’Uppsala et de l’Université de Stockholm où il réalise un doctorat en économie politique en 1934. Il obtient par la suite un poste à la Banque Centrale de Suède en 1936, dont il devient le Président du Conseil d’Administration de 1941 à 1948. C’est dans ce cadre qu’il participe à la Conférence de Paris concernant la mise en œuvre du Plan Marshall. Il participe aussi à la Conférence créant l’Organisation Européenne de Coopération Economique (OECE) en 1948.
Connu pour sa participation aux négociations internationales sur la reconstruction du continent européen après la guerre, il parvient à occuper une place prédominante dans la construction de l’Europe économique. En 1949, il devient Ministre des Affaires étrangères. Ce poste lui permet de renforcer sa politique de coopération internationale, à la fois économique avec l’OECE, mais aussi politique avec le Conseil de l’Europe.
La diplomatie onusienne au coeur de son parcours
Le diplomate représente la Suède aux Nations Unies en 1949, et de 1951 à 1953. En 1953, il est élu Secrétaire général des Nations Unies, et réélu en 1957. Durant ces années, il élabore notamment une refonte interne du secrétariat en affirmant l’indépendance des Nations Unies à l’égard des intérêts nationaux des Etats membres.
Plusieurs victoires diplomatiques lui sont attribuées : en 1955, il négocie personnellement la libération des soldats américains capturés par la Chine pendant la guerre de Corée. En 1956, lors de la crise du Canal de Suez, il obtient l’annulation du recours à la force par Israël, la Grande-Bretagne et la France, et envoie la Force d’Urgence des Nations Unies (FUNU), première force d’urgence jamais mobilisée par une organisation internationale. En 1958, il crée le Bureau des Nations Unies en Jordanie et le Groupe d’Observation des Nations Unies au Liban, et obtient ainsi le retrait des troupes américaines et britanniques.
Enfin, il se concentre également sur les tensions résultant de l’indépendance des divers pays colonisés, notamment la crise congolaise. En 1960, le Congo demande l’intervention de l’ONU, qui répond en envoyant une force de maintien de la paix, avec Hammarskjöld à sa tête. Si ce dernier est décidé à trouver une solution pacifiste, assistant au blocage de la situation après quelques mois, il autorise l’intervention militaire de l’ONU : l’opération Morthor. Quelques jours après la prise en otage de casques bleus, Hammarskjöld décide de rencontrer directement le Président Tshombe du Katanga pour négocier un accord de paix. Son avion s’écrase dans la nuit près de la frontière entre le Katanga et la Rhodésie du Nord, il meurt dans l’accident, le 17 septembre 1961.
Les causes du crash aérien ne sont toujours pas élucidées à ce jour, mais un rapport remis à l’ONU en 2017 déclare plausible qu’une attaque ait été orchestrée contre le diplomate.
Une vie dédiée à la paix
Utilisation de la FUNU, déploiement d’une présence du l’ONU sur les terrains en situation de crise, intensification du rôle du Secrétaire général : avec un bilan remarquable à la tête de l’Organisation des Nations Unies, Dag Hammarskjöld a instauré de nouvelles tactiques et procédures au sein de la jeune organisation.
En insufflant des valeurs fortes inspirées de la Chartes des Nations Unies et en développant ce qu’il appelle la « diplomatie préventive », Hammarskjöld a œuvré pour la paix, dans différentes crises et sur différents continents. Pour son intégrité, son efficacité et son implication pour la paix jusqu’à sa mort, il se verra décerner le Prix Nobel de la Paix à titre posthume en 1961.
Outre son action pour le règlement des conflits, Dag Hammarskjöld incarne aussi une période dorée de l’ONU. Celle-ci est aujourd’hui remise en question en raison de la paralysie de l’organisation dans les crises, comme on l’observe avec la guerre ukrainienne. Le droit de véto russe l’empêche en effet de prendre de grandes résolutions.
Marie Colas , "Dag Hammarskjöld. Monsieur H, diplomate pour la paix ". Portrait [en ligne], 17.07.2023, https://observatoire-multilateralisme.fr/publications/dag-hammarskjold/